L’Activisme Des PDG Sous L’Ère Trump

Auparavant, les PDG ne commentaient pas les règlementations et les politiques gouvernementales autres que celles qui affectaient directement leurs industries ou leurs entreprises. Les préoccupations de l’entreprise étaient purement commerciales et s’exprimer sur des questions dépassant le cadre des affaires était un anathème.

De nos jours, des centaines de PDG ont évalué les risques de ne pas s’exprimer et ont décidé de le faire publiquement. Ils se sont positionnés sur des problèmes sociaux, politiques et environnementaux, tels que le changement climatique, les droits LGBT, l’égalité de rémunération, l’immigration, le contrôle des armes à feu et les questions raciales. La plupart de ces CEO sont basés aux États-Unis mais plusieurs gouvernent des entreprises mondiales.

En 2015 et 2016, nous avons vu des douzaines de dirigeants se prononcer contre les lois anti-LGBT dans une poignée d’États comme l’Indiana, la Géorgie et la Caroline du Nord. En 2017, à mesure que l’administration Trump a pris ses fonctions, l’activisme des PDG a augmenté. Cela ne veut pas dire que la majorité d’autres eux ont pris position ; ces leaders représentaient un petit groupe assez influent.

Des PDG qui n’hésitent plus à s’exposer médiatiquement

Chez Weber Shandwick, nous avons constamment analysé la manière dont les PDG et les entreprises (de taille variable, mais surtout ETI et grandes entreprises) ont répondu à chacune des cinq actions et déclarations controversées de Trump en 2017 : l’interdiction de voyager (janvier), le retrait de l’Accord de Paris sur les changements climatiques (juin), l’interdiction des membres des services transgenres dans l’armée américaine (juillet), le commentaire du président américain selon lequel « de nombreuses parties » étaient responsables de la mort d’une femme lors d’une manifestation à Charlottesville en Virginie (juillet) et la décision de mettre fin au DACA – programme qui conférait un statut légal aux jeunes migrants arrivés illégalement aux États-Unis avec leurs parents (Septembre). Au total, nous avons rassemblé 425 réponses.

Les réponses des entreprises n’ont pas suivi une stratégie uniforme. Chaque événement politique a donné lieu à des réactions différentes (mémoires, lettres ouvertes, démissions des conseils présidentiels et utilisations de nouveaux hashtags sur les réseaux sociaux).

Pour m’être longuement intéressée aux dirigeants, je crois que cet activisme montre comment les PDG se tiennent responsables en soutenant les valeurs de leurs organisations. Pourquoi maintenant ? Tout d’abord, les employés, les clients et les autres acteurs en demandent plus aux chefs d’entreprise car ils se méfient deschiffres du gouvernement. Deuxièmement, de nombreuses entreprises ont investi beaucoup de temps et d’argent dans l’établissement de valeurs fondamentales, telles que la diversité et l’intégration. Par exemple, Google a investi 265 millions de dollars dans des programmes de diversité de 2014 à 2016 à elle seule. Si la politique gouvernementale va outre ces valeurs, les entreprises se sentent obligées de s’exprimer. Troisièmement, ne pas se prononcer sur certaines questions impacte négativement la capacité d’une organisation à recruter des talents, en particulier la génération Y, très convoitée. Sur la base de notre récent sondage auprès de 1 021 adultes américains menés avec KRC Research, deux fois plus de membres de la génération Y ont déclaré sentir leur loyauté accroître (plutôt qu’une baisse de loyauté) envers leur propre PDG s’il prenait position sur une question très débattue (44 % contre 19 %).

Le secteur technologique prend l’initiative

En analysant comment les chefs d’entreprise ont répondu à ces cinq événements, nous avons remarqué six modèles qui pourraient aider les PDG, les conseils d’administration et les cadres supérieurs à comprendre l’environnement « blâmé si vous le faites, maudit si vous ne le faites pas » et comment cela impacte leur réputation :

1. Les PDG parlent généralement d’eux-mêmes. La majorité des porte-parole de l’entreprise qui ont répondu aux cinq événements que nous avons suivis ont été directeurs généraux. Trois quarts ou plus des déclarations proviennent directement du plus haut échelon, avec l’interdiction de voyager (84 %) et les conséquences de Charlottesville (77 %). Par exemple, lorsque le directeur général de Merck, Kenneth Frazier, a démissionné de Manufacturing Jobs Initiative du président Trump après la réponse de ce dernier aux événements de Charlottesville, il a déclaré : « Les dirigeants américains doivent honorer nos valeurs fondamentales en rejetant clairement les expressions de la haine, de la bigoterie et de la suprématie de groupe, qui va à l’encontre de l’idéal américain qui atteste que toutes les personnes sont égales». Selon nos recherches, la majorité des réponses des PDG et des entreprises (75 %) à la suite de Charlottesville sont venues après la position de Frazier.

D’autres dirigeants d’entreprises s’expriment aussi. Les réponses de l’entreprise à l’annulation potentielle du DACA regroupaient plus de cadres que de CEO. Par exemple, le président et chef juridique de Microsoft, Brad Smith, a déclaré que si le gouvernement choisit d’expulser les « Dreamers », ces migrants arrivés illégalement aux États-Unis quand ils étaient mineurs et qui ont grandi aux États-Unis, qui sont des employés de Microsoft, « il faudra nous passer sur le corps pourles atteindre». Le conseiller général de Verizon, Craig Silliman, s’est exprimé sur l’opposition de son entreprise en écrivant sur le blog de celle-ci, « 800 000 raisons pour lesquelles la diversité est importante ». David Cohen, l’administrateur en chef de la Diversité de Comcast, a écrit un mémo exprimant sa déception à la fin de DACA et a déclaré que « les initiatives pour protéger les Dreamers sont conforment à nos valeurs en tant qu’Américains et dans l’intérêt de notre pays ».

2. Le secteur de la technologie prend l’initiative. Le secteur de la technologie a été le précurseur pour parler ouvertement de ces cinq problèmes. 75% des 28 réponses des entreprises interrogées au sujet de l’interdiction des transgenres à servir dans l’armée viennent des entreprises technologiques. La moitié des 153 réponses à l’interdiction de voyager (51 %) vient des entreprises technologiques. Nous avons constaté que sept entreprises technologiques se sont exprimées en opposition à tous les événements depuis janvier 2017 : Apple, AirBnB, Box, Facebook, Intel, Microsoft et Salesforce.
Mais le secteur de la technologie n’est pas le seul secteur à s’exprimer ouvertement. Le secteur de la finance a également participé activement aux cinq occasions. Les dirigeants des entreprises telles que Goldman Sachs (ex. l’interdiction de l’immigration, Charlottesville), JPMorgan (ex. Charlottesville, DACA) et Bank of America (ex. l’interdiction de l’immigration, DACA) ont tous fait des déclarations officielles à plusieurs reprises. Plusieurs PDG du secteur de l’énergie (ex. Patrick Pouyanné de Total et Bob Dudley de BP) se sont également prononcés contre l’ordonnance de l’administration permettant aux États-Unis de se retirer de l’Accord de Paris.

3. Les entreprises trouvent la force en nombre. Le mémoire d’amicus curiaesigné par près de 100 entreprises présenté lors de la bataille judiciaire contre l’interdiction de voyager du président Trump a mis en marche ce qui est devenu une stratégie de sécurité. En s’unissant en opposition à une politique gouvernementale, les PDG ont mis en commun le risque des entreprises individuelles qui peuvent être exposées à des représailles en s’exprimant ouvertement. Depuis, il y a eu plus de lettres ouvertes, de coalitions ou d’associations industrielles exigeant que les politiques soient réexaminées ou des déclarations retirées. Par exemple, plus de 1 600 entreprises et investisseurs ont signé la déclaration We Are Still In pour soutenir l’action climatique et plus de 500 chefs d’entreprise ont prêté leurs noms dans une lettre ouverte au président Trump lui demandant de maintenir DACA.


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