Entreprise — 09/09/2016 at 09:00

ZARA : Les secrets d’une mode à très grande vitesse

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Décor aseptisé, open space gigantissime : bienvenue en Galice, chez le leader mondial de la confection textile. Six cent mille mètres carrés au service d’une mode qui va vite, très vite.

Vous n’êtes pas à New York, Paris ou Madrid, mais dans la banlieue de la Corogne, en Galice. Ici, nous pratiquons l’humilité et avons une unique préoccupation : satisfaire la demande de nos clients.» Voilà comment Jesús Echevarría, le porte-parole du géant espagnol inditex, maison mère de Zara, plante le décor. Pas un des 4.000 salariés du siège social ne joue les vedettes. La star, c’est le client. La scène, ce sont les 6.340 magasins du groupe. Et les coulisses se trouvent sous nos yeux, dans cette véritable cité de 600.000 mètres carrés, siège d’un empire du prêt-à-porter pesant plus de 16 milliards d’euros.

PAS UNE TÊTE NE DÉPASSE. Les nouveaux locaux du bâtiment central (160.000 mètres carrés) sont fonctionnels. Pas de fioritures, pas d’œuvres d’art sur les murs lisses, blancs ou noirs. Dans le hall, seul l’ascenseur de verre s’anime. Il dessert les différents pôles, conçus sur un modèle strictement identique : au rez-de-chaussée, Zara Home ; au premier, Zara Homme ; au second, Zara Enfant. Et à droite, dans une aile du bâtiment, on pénètre dans le centre de pilotage de Zara Woman.

Les mots de Jesús Echevarría prennent alors tout leur sens. Un open space de 24.000 mètres carrés s’étale à perte de vue. Pas une tête ne dépasse. Au centre, des centaines de jeunes gens se font face par écrans interposés. Leur alignement n’est interrompu que par des tables de réunion blanches, surmontées par des tableaux noirs rétro-éclairés. Ici et là, des dizaines de designers sont installés. Aux alentours, un espace merchandising reprend les codes des magasins. Et plus loin, bien cachées, des machines à coudre réalisent les prototypes. Les 400 salariés font peu de bruit. Seule une musique donne le tempo, celle diffusée dans les magasins.

Zara est une enseigne à deux vitesses. Un tiers des produits proposés en boutique sont des basiques (tops, chinos…) . Les designers fixent la tendance des mois à l’avance, dessinent une collection pour une saison et lancent la confection dans les ateliers d’Asie ou d’Amérique du Sud. Classique. Mais pour les deux autres tiers s’applique le fameux modèle de la fast fashion. Qui s’appuie sur une organisation en trois étapes. Le mot d’ordre : réactivité maximale.

ÉTAPE N°1 : LE PROTOTYPAGE. Chaque commercial de l’allée centrale gère de 20 à 30 boutiques dans un pays donné. Il analyse en temps réel les ventes de ses unités. Dès qu’un engouement se manifeste pour un produit, une veste par exemple, il demande aux designers d’en concevoir un autre dans le même esprit. Le prototype est confectionné sur les machines situées un peu plus loin, puis on l’essaie sur un mannequin. Une fois les retouches faites, il est placé dans l’espace merchandising à côté de modèles similaires. Après plusieurs microréunions de validation, la production est lancée en toute petite quantité. «Aucune pièce n’est reproduite à l’identique et le modèle n’est disponible que quinze jours en boutique. Nos clientes ne nous pardonneraient pas de ressembler à leurs voisines», explique le porte-parole. Zara sait surtout créer le manque pour susciter l’achat immédiat. Toutes les semaines, 15% du magasin change. Les rouages qui ont imposé la fast fashion dans le monde sont bien rodés. Chaque commercial, en veille sur 12.000 références, dispose de soixante-douze heures pour passer, avec ses stylistes, du croquis à la confection. Autant dire qu’il n’a pas le temps de se reposer sur ses lauriers. «Chez nous, le mot succès n’existe pas. Si vous avez réussi, c’est que vous êtes arrivé à un palier et que vous relâchez vos efforts.»

ÉTAPE N°2 : LA FABRICATION. Dans les sous-sols aveugles de Zara City, sur d’immenses tables, sont étalées plusieurs épaisseurs de tissu. Des bras laser découpent les pièces constituant notre fameuse veste suivant les cotes fournies par la prototypiste. Placés sur un chariot, ces éléments filent vers l’usine attenante. Car, à la différence de H&M, Inditex est d’abord un fabricant. Le site compte dix centres de confection pour les pièces complexes (pantalons, vestes, manteaux…). Le reste de la production fast fashion est confié à des usines au Portugal ou au Maroc, ou à des sous-traitants en Turquie et dans les pays de l’Est. Une fois montés, les vêtements reviennent dans les centres logistiques de la Corogne. Depuis le début du processus, quinze jours se sont écoulés.

ÉTAPE N°3 : LA LOGISTIQUE. Depuis peu, les repasseuses en blouse insèrent dans chacun des vêtements, via le système antivol, des puces RFID. «Ce système permet de lire les données de 400 articles à la seconde. Grâce à ces puces radio, Inditex peut savoir où est chacun de ses articles et éviter toute erreur humaine dans la gestion des stocks», relate Laurent Raoul, spécialiste de la supply chain dans la mode. Un système onéreux que seule l’enseigne Zara pouvait s’offrir à cette échelle. Avant, un vendeur passait 60 % de son temps à réaliser des inventaires pour assurer les relevés des ventes, fondements de la fast fashion. Désormais, quelques bips suffi sent. Ce qui lui laisse du temps pour s’occuper des clients et ranger le magasin…

Mais revenons à nos vestes. Après un long périple, chaque lot se retrouve face à un mini-box correspondant à un magasin Zara. Une petite main tout de noir vêtue les plie en quelques secondes dans un carton qui glisse sur un immense tapis roulant. Si le magasin est en Europe, direction l’un des 250 camions qui livre en vingt-quatre heures maximum. Au-delà, les vêtements partent en avion. En tout, trois semaines se seront écoulées entre l’enregistrement du pic de vente et l’arrivée du réassort, fabrication comprise. En un an, les centres logistiques du groupe traitent ainsi 949 millions de pièces… Une idée de l’infini.


Source : Anne-Laure Allain – Capital.fr

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